
Les cicatrices rouges de la Terre
Au cœur des volcans de Timanfaya, là où la terre se souvient du feu et le ciel murmure encore l’écho des origines
Nous sommes ici sur les routes longues et étroites de Timanfaya, à Lanzarote, au cœur d’un paysage volcanique où la terre semble encore vibrer de l’histoire du feu. C’est un endroit presque silencieux, presque hors du temps. Le ciel est bleu, mais chargé de nuages, un bleu profond, traversé de masses blanches et grises, et c’est d’ailleurs la seule vraie couleur claire qu’on perçoit ici. Le reste, c’est la terre, et cette terre-là est sombre, brûlée, cramoisie, parfois noire, parfois rouge foncé, toujours intense.
Partout autour de moi, des volcans à perte de vue. Des lignes puissantes, presque inquiétantes, qui tranchent avec le ciel lumineux. Il n’y a ici aucune végétation, aucun signe de vie animale. Rien que la roche, la poussière, et l’humain qui passe. Et cette route, si étroite qu’elle semble posée là comme une ligne tracée au couteau, serpente au milieu du néant. Elle va, je ne sais pas où. Et c’est peut-être ça qui la rend si forte.
À droite, un volcan aux teintes jaunes et orangées surgit dans le paysage. Il semble presque doré par endroits, et au-dessus de lui, les nuages s’épaississent, deviennent plus sombres, comme s’ils voulaient couvrir le sommet de leur propre silence. Le contraste est saisissant, la lumière du ciel contre la densité de la roche. L’éclat contre l’ombre. C’est un paysage brut, presque lunaire. On pourrait croire qu’on a quitté la Terre.
Mais avant de prendre cette photographie, j’ai dû me battre un peu contre la route elle-même. Il y avait très peu de place pour s’arrêter, et les voitures n’ont pas toujours le luxe du calme ici. J’ai attendu, j’ai cherché un coin pour me garer sans gêner, j’ai failli renoncer, et puis, à un moment, l’instant s’est ouvert. La lumière était là, les nuages se sont placés, et j’ai déclenché.