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Mouette supersonique

À Empuriabrava, dans la lumière dorée d’un soir d’été, une mouette en plein vol devient plus qu’un oiseau : une traînée de vitesse et de liberté, saisie dans le flou d’un instant suspendu.

Nous sommes à Empuriabrava, en Espagne, dans la lumière dorée d’un soir d’été. Je marchais au-dessus de la plage, sur un chemin légèrement surélevé qui longe la mer, un peu à l’écart du sable, avec une vue dégagée sur l’horizon et ce ciel immense qui semblait vouloir tout emporter avec lui. L’air était chaud, traversé par des courants plus frais, et comme toujours à cette heure, les mouettes étaient là, en mouvement constant, en vol, en cris, en cercles. Elles faisaient partie du paysage, presque comme les vagues elles-mêmes.


Mon appareil photo à la main, je commençais par les photographier de façon classique, presque sans réfléchir, juste pour saisir leur forme, leur vol, leur élégance dans l’air. Mais très vite, j’ai compris que ce que je voyais n’était pas simplement une scène paisible. Certaines mouettes fendaient le ciel à une vitesse étonnante, passaient en flèche, surgissaient puis disparaissaient comme des éclairs. Il y avait quelque chose de plus brut, de plus instinctif, presque supersonique. Et c’est à ce moment-là que j’ai eu envie de changer d’approche.


J’ai modifié les réglages de mon appareil, choisi une vitesse d’obturation plus lente, volontairement, pour créer un flou de mouvement, un effet de vitesse, pour ne pas figer l’animal mais montrer l’énergie, la trace, le passage. J’ai commencé à photographier non plus l’oiseau lui-même, mais ce qu’il laissait derrière lui, cette impression de mouvement rapide, cette vibration dans l’air. Cent cinquante déclenchements, peut-être plus, toujours avec cette idée de saisir l’invisible, de capter le moment où la vitesse devient forme.


Et dans cette série, trois images ont émergé. Trois où l’instant et l’intention se sont rejoints. Sur l’une d’elles, particulièrement, quelque chose s’est produit. La mouette ne ressemblait plus à une mouette. Elle s’était transformée, étirée, allongée. Sa silhouette floue, tendue, semblait celle d’un avion de chasse en piqué, une flèche vivante projetée dans le ciel du soir. Ce n’était plus un oiseau, c’était une sensation de puissance, de vitesse, de liberté pure.

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