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La Solitude

Dans le silence doré de la Camargue une libellule rouge incarne la beauté fragile d’un instant suspendu

Nous sommes en Camargue, à quelques kilomètres d’Aigues-Mortes, sur une route étroite bordée de silence et de lumière. Le chemin semble oublié, perdu entre deux mondes : à gauche, une végétation dense et profonde, faite de roseaux, de buissons sauvages et d’herbes hautes. À droite, un étang paisible aux reflets rosés, teinté par les cristaux de sel en suspension dans l’eau — comme si la nature avait laissé sa propre trace de rêverie.

L’air est tiède, légèrement salé. Le soleil est haut, la lumière précise. Tout semble figé. Et dans ce calme presque absolu, je l’aperçois.

Seule. Posée sur une tige fine, au bord de l’étang : une libellule rouge.Son corps élancé, d’environ sept centimètres, semble fragile mais vibrant. La couleur est intense, presque irréelle — un rouge ardent, comme une flamme suspendue au-dessus de l’eau.

Elle ne bouge pas. Ou très peu. Elle attend, peut-être.Autour d’elle, tout est silence. Aucun autre insecte, aucun signe de mouvement. Elle est là, unique, solitaire. Et c’est cette solitude, paradoxalement, qui la rend si belle.Elle semble danser avec l’invisible — un courant d’air, un éclat de lumière, une pensée qui passe.

Je m’approche doucement. Je prends le temps. Je cherche la bonne distance, le bon souffle.Mon appareil devient prolongement de mon regard : je ne veux pas seulement capturer une image, mais honorer un instant fragile, celui de la présence silencieuse d’un être libre, seul, mais intensément vivant.

Ce cliché, pour moi, n’est pas juste une photographie de nature.C’est un portrait. Le portrait d’une solitude belle, lumineuse, assumée.Celle d’une libellule rouge, gardienne éphémère d’un monde suspendu, entre ciel, sel et silence.

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